19. Origine des connaissances sexuelles - L'école

Publié le par jidejeando

L’école

L’éducation sexuelle à l’école constitue à la fois un sujet d’actualité et un champ de polémique. En effet, si la quasi unanimité des éducateurs, des psychologues et des responsables politiques des pays occidentaux conviennent que des informations doivent être fournies aux enfants et aux adolescents dans le cadre de leur cursus scolaire, des controverses parfois violentes se développent sur le contenu et la philosophie d’une telle instruction. En réalité, l’école, depuis plus d’un siècle, n’est jamais totalement demeurée à l’écart dans ce domaine. Que ce soit à travers les anciens cours de sciences naturelles en France, les cours de biologie ou les cours sur la santé dans les pays anglo-saxons, les écoliers de l’ancien et du nouveau continent ont toujours au moins été confrontés au mécanisme de la reproduction chez les mammifères et les vertébrés. Leur imagination pouvait alors librement s’exercer. Depuis quelques décennies, les fonctions de l’école ont été élargies ; elle ne se contente plus de dispenser un savoir, elle est appelée à jouer un rôle déterminant dans la formation humaine, morale et sociale des enfants. Pour la quasi-totalité des personnes interrogées pour le compte du magazine Test Achats, dont les résultats ont été publiés par le quotidien La Libre Belgique du 30 mars 2006, l'école doit rester le canal d'information à l'égard des jeunes sur la sexualité. Deux tiers des répondants à cette enquête manifestèrent le souhait que des cours d'éducation sexuelle soient dispensés dès l'école primaire, tandis que la moitié estimait qu'il fallait mettre gratuitement des préservatifs à disposition dans les écoles secondaires.

Car la société occidentale contemporaine est confrontée à deux problèmes de mœurs et de santé publique majeurs, qui touchent particulièrement les adolescents : le SIDA et les autres maladies sexuellement transmissibles d’une part, l’importance du nombre de grossesses de filles mineures d’autre part. L’éducation sexuelle à l’école, dans la plupart des pays occidentaux, poursuit comme but principal avoué d’éradiquer, ou tout du moins de combattre, ces deux fléaux. En aucun cas elle vise directement à répondre aux préoccupations des adolescents en matière de sexualité. C’est ce qu’exprime très précisément ce jeune Anglais de 15 ans :

• Bon, dans mon école, l’éducation sexuelle est enseignée sous son aspect biologique et non en fonction de ce que nous avons besoin de connaître (…). Elle ne parle pas : 1/ De la masturbation (Le pire c’est que ça amène les ados à penser que c’est mal, puisqu’ils ne mentionnent que les éjaculations nocturnes, ce que beaucoup de jeunes d’ont pas) ; 2/ Du sexe oral (MST, etc.) ; 3/ Des relations sexuelles (ou plutôt ils insistent pour dire que la seule sexualité possible c’est l’hétérosexualité. (GT, 15 ans, Royaume Uni)

L’éducation sexuelle s’inscrit donc dans une politique de santé publique qui, comme toute autre politique, subit les aléas des bouleversements institutionnels des pays dans lesquelles elle est appliquée. Ainsi, aux Etats-Unis, une véritable bataille oppose les « progressistes » et les « conservateurs » pour imposer leur vision de l’éducation et de la morale sexuelle. Cette bataille se focalise autour d’un slogan : « Abstinence Only Programme[1] ». L’actuel gouvernement des Etats-Unis investit des dizaines de millions de dollars chaque année pour tenter d’imposer dans les établissements scolaires de tous les Etats des cours d’éducation sexuelle où on enseigne aux adolescents s’abstenir de toute relation sexuelle avant le mariage ou l’âge adulte ; aucune information sur la contraception n’est donc dispensée. Les opposants à ce programme répondent que celui-ci ne répond pas aux besoins réels des adolescents et peut être directement la cause de grossesses non désirées, d’avortements et de propagation des MST. Or les partisans du programme d’abstinence se placent exactement sur le même terrain, puisqu’ils rétorquent que c’est en enseignant aux élèves des méthodes contraceptives qu’on les désinhibent en quelque sorte et qu’on favorise ainsi les relations sexuelles entre mineurs, avec toutes les conséquences que cela peut entraîner, comme l’augmentation des grossesses non désirées, des avortements et des MST. Depuis deux ans, les partisans et les adversaires de ce programme s’affrontent à coups de statistiques sur la diminution des taux de grossesse de filles mineures, selon que celles-ci s’étaient ou non engagées dans ce programme.

 

La forme et le contenu de l’enseignement scolaire sur la sexualité varient non seulement selon les pays, mais parfois selon les régions et le caractère public ou privé, confessionnel ou non, des établissements qui le dispense. Ainsi :

-         les cours peuvent être réservés à une classe d’âge, ou être distillés sur plusieurs années.

-         ils peuvent être dispensés dès le primaire ou réservés aux élèves du second degré.

-         ils peuvent être intégrés dans une matière scolaire plus large, comme la santé ou la biologie, ou se dérouler sous forme de conférences ou d’activités dirigées par un professionnel de l’établissement (infirmière, médecin) ou extérieur à celui-ci.

-         ils peuvent présenter un caractère facultatif, mixte (avec autorisation écrite des parents) ou obligatoire.

-         ils peuvent s’adresser à des élèves regroupés selon leur sexe ou à des groupes mixtes

-         les sujets abordés peuvent être plus ou moins variés et proches de la réalité des aspirations des jeunes dans ce domaine, et les explications fournies revêtir une forme plus ou moins explicite.

Dans l’enquête Surveyteens, le Questionnaire complémentaire à remplir en ligne sur le site proposait la question suivante : « Est-ce qu'on t'a déjà donné des cours d'éducation sexuelle à l'école? ». 83,2% des garçons répondirent par l’affirmative. Un sondage du site Vteen, ciblant principalement les jeunes nord-américains, proposa la question suivante : « Dans quelle classe avez-vous eu vos premiers cours d’éducation sexuelle ? ». Le graphique 19 montre que les deux tiers des élèves déclarèrent que ces premiers cours avaient été dispensés à l’école primaire[2].

Graphique 19

 

Les trois sites américains sur lesquels je m’appuie principalement pour cette étude ont demandé à leurs membres quel était le contenu des cours auxquels ils avaient assisté. Les témoignages fournis par ces garçons de diverses nationalités principalement anglo-saxonnes, s’ils présentent quelques caractéristiques communes, démontrent surtout une grande variété de situations et de réactions des élèves.

• Quand j’étais en 5ème année ils ont montré des tableaux des organes reproductifs, comment l’oeuf était fertilisé, ce que c’était que le sexe… tout ce que je savais déjà. Je n’ai pas eu d’autres cours d’éducation sexuelle depuis, et je suis en dixième année maintenant… et je passe au lycée l’année prochaine… c’est triste qu’on m’ait raconté que des trucs que je connaissais déjà… mais je pense que les enfants qui ont grandi dans des « foyers parfaits » avec des parents conservateurs ne sauront jamais que ça… (GT, 16 ans, USA, Virginie)

• Notre école ne nous apprend rien, juste ils nous parlent des MST mais ils ne vous disent pas comment on les attrape lol. Je pense que c’est parce qu’ils ne veulent pas nous dire comment avoir des relations sexuelles (GT, 15 ans, USA, Missouri)

• Je vais dans une école chrétienne, on nous a dit les bases en classe de sciences et l’aspect émotionnel de base en cours de santé. Mais on ne nous a pas dit grand-chose parce qu’ils pensaient que nous connaissions le reste ou parce qu’ils étaient gênés de nous l’apprendre (GT, 14 ans)

• On nous a donné les bases en 5ème année, mais en 8ème année c’était une autre histoire. Le sujet de la masturbation est sorti… Un enfant demanda « Est-ce que le sperme peut sortir autrement que pendant les pollutions nocturnes. ». Alors toute la classe s’est mise à rire, mais je pense que le garçon ne savait pas ce que c’était la masturbation parce qu’il a demandé si c’était bien de le faire, mais le professeur lui a dit de demander à ses parents (GT, 15 ans, USA, Chicago)

• L’éducation sexuelle au secondaire fait chier, ils escamotent tout et en fait ils se concentrent plus sur les MST que sur le sexe lui-même. J’ai appris la plupart de ce que je sais sur le sexe par Internet et les copains (GT, 15 ans, USA, Chicago)

• L’éducation sexuelle c’est cool… j’avais les mêmes craintes… mais mon prof est vraiment sympa… et il ne s’est rien passé de choquant jusqu’à présent… mais quand y’a un truc drôle, tout le monde rit… mais en fait j’ai appris plein de trucs… et rappelez-vous… c’est de l’éducation (GT, 14 ans)

• Pourquoi l’école ne peut pas nous montrer comment le sexe fonctionne ? Y’a des gens qui ne savent même pas dans quel trou il faut mettre le pénis, imaginez ce que ce serait ! En fait, quelques enfants ne savent même pas mettre un préservatif, et utiliser une banane n’est pas très pratique parce que la banane n’a pas de prépuce ni d’éjaculation (GT, 15 ans, USA, Californie)

• Mon programme d’éducation sexuelle à l’école est vraiment très complet  et je pense qu’ils font du bon travail. On a eu nos premiers cours d’éducation sexuelle en 5ème année, puis en 7ème puis en 9ème. Ils nous disent à peu près tout de ce qu’on doit savoir, même si je savais tout avant d’aller à ces cours. J’étais un perverti… Je savais pas mal de chose sur le sexe, même quand j’étais petit. (GT, 15 ans)

• Ouais je ne suis pas sûr que ça compte mais je vais dans un collège catholique et nous avons une sorte de cours d’éducation sexuelle de rattrapage où tous les garçons de l’école sont séparés des autres filles. Un des professeurs vient dans la classe et parle pendant une heure sur comment agir avec les femmes et comment les filles sont décrites dans les médias et des trucs comme ça. Ca n’a absolument rien à voir avec la puberté ou le sexe. Peut-être est-ce ce message ‘Pas de sexe avant le mariage » qu’ils nous adressent tout le temps. (GT, 15 ans, USA, Philadelphie)

• Notre cours d’éducation sexuelle c’est n’importe quoi. On vous montre une vidéo qui explique la base et une infirmière arrive et nous parle de la contraception et des MST. C’est vraiment n’importe quoi d’après moi. Je ne suis pas dans une école catholique. (GT, 16 ans, Royaume Uni)

• Ce qui se fait dans une classe de CM2 n’était pas vraiment de l’éducation sexuelle ; ça s’appelait « croissance et changement », où on nous expliquait en gros que notre pénis ne sert pas seulement qu’à pisser. Ils ont légèrement parlé des événements de la puberté. Puis en 5ème on a eu une autre session d’éducation sexuelle où on nous parlait de toutes les fonctions, des trucs sur les différentes parties du corps et un petit peu de sexe, pas beaucoup. Et en 3ème (à cette époque c’était stupide parce que tout le monde en savait autant que le prof) on a eu un autre cours sur la grossesse des jeunes, le sexe protégé et des trucs comme ça. On a aussi appris de quoi était constitué la semence, pourquoi elle était créée et des conneries comme ça. La seule chose que j’ai apprise là c’est que le liquide séminal doit recouvrir le vagin pour que la semence ne meure pas à cause de l’acidité des parois vaginales. (GT, 16 ans, USA, Colorado)

• Dans mon école ils parlent surtout de protection et ils donnent des détails sur la fécondation de l’oeuf par le sperme, pourquoi pas ? Il y avait un dessin de pénis au repos montrant l’intérieur de celui-ci et un dessin d’ovaires. C’était tout. (GT, 16 ans)

• On a regardé un film où des enfants disaient ce qu’ils faisaient et ce qu’ils ne faisaient pas, puis la femme nous a parlé des bases d’une relation… C’était assez amusant. (GT, 13 ans)

• On a eu quelque chose dès la 6ème année je pense, certainement l’année suivante. En 9ème année, on a atteint les hauteurs vertigineuses des préservatifs sur des carottes. L’éducation sexuelle c’est pas aussi marrant que ça en a l’air, et c’est vraiment irritant si il y a plein de gens immatures. J’ai aussi vu une vidéo en 6ème année, avec une famille nue sur la plage… J’ai rien compris non plus. (GT, 14 ans, Royaume Uni)

• Nos cours d’éducation sexuelle sont tellement vieux jeu. Tous les garçons sont séparés des filles et un des profs homme les plus cool est entré et nous a dit d’être sympa avec les filles, de bien les traiter et des trucs comme ça. C’était stupide mais ça ne dure généralement que vingt minutes. (GT, 15 ans, USA, Philadelphie)

• On en a eu en 4ème année, quand j’avais environ 10 ans. Des trucs vraiment basiques et stupides. Tous les garçons dans une salle, toutes les filles dans une autre. Pollution nocturne, poils pubiens, etc. Rien de sexuel. On a eu aussi un cours en 9ème année. Uniquement sur le sexe, les MST, etc. Oui, on a vu des varies photos de vagins et de pénis infectés, de corps avec toutes sortes de maladies. Filles et garçons dans la même classe. (GT, 16 ans, USA, Californie)

• Quand j’ai eu ce cours, on nous a seulement parlé des MST. (GT, 16 ans, Australie, Perth)

• C’est étrange que j’ai eu ces cours pendant près d’un an quand j’avais 12 ans, et il ne s’est plus rien passé depuis, ce qui est étrange puisque j’ai maintenant 15 ans et que j’approche l’âge de la majorité sexuelle ; je pense qu’ils auraient du nous en dire plus. (GT, 15 ans, UK, Dorset)

• Oui, je suis à peu près sûr que la plupart des écoles comportent des programmes d’éducation sexuelle. Le but de la plupart d’entre eux est de nous donner une éducation anatomique, puis de nous enseigner à nous protéger et à rester abstinents avec toutes ces MST. Généralement ils montrent quelques photos de personnes infectées ou malades, mais c’est plutôt des dessins de certaines parties, afin de pouvoir les nommer. Ca s’est passé comme ça l’année dernière. (GT, 16 ans)

• J’ai eu un cours en 4ème année, il y a longtemps, je suis en 8ème année maintenant. C’est étrange parce que d’autres 8ème année en ont eu un. Mais en fait je m’en fiche et je suis sûr que c’est pareil pour les autres, parce qu’ils connaissent déjà tous les trucs et ils n’ont pas besoin qu’on leur apprenne. Je souhaite vraiment qu’on puisse parler des MST parce que c’est quelque chose que tout le monde devrait savoir. (GT, 14 ans, USA, Texas)

• J’ai suivi des cours depuis la 5ème année jusqu’à maintenant… Chaque année ça va un peu plus loin. Certaines années, on voit des illustrations, d’autres, des photos, pas de porno ou des trucs choquants. (GT, 16 ans, USA, Milwaukee)

• Notre école est vraiment bonne en éducation sexuelle. On nous a honnêtement donné tous les détails des parties du corps masculin et féminin, on nous a dit ce que c’était que le sexe et tous ces trucs là. On nous a même montré des bandes dessinées qui montrent comment avoir une relation sexuelle ! On ne nous a pas dit comment doigter une fille mais on nous a parlé de la masturbation et de comment ça marche. On nous a parlé des différentes MST, comment elles étaient transmises et on nous a même dit où on pouvait avoir des préservatifs gratuits ! On nous a vraiment tout dit au sujet du sexe. Même le sexe anal. Sans rire ! (GT, 17 ans, Royaume Uni)

 Sur le site Govteen, un garçon de 14 ans entama une discussion sur ce thème, mais sur un mode plus ironique : «  En classe, si vous avez des cours d’éducation sexuelle ou autre chose, est-ce que ça vous excite ? Pas moi… et je pense que je suis bizarre sur ça, parce que la plupart des gens de ma classe deviennent dingues quand le prof dit des trucs comme ‘pénis’, ce que je trouve pas drôle. En plus je suis du genre expansif et je parle fort, et je ferais n’importe quoi devant ma classe, si le prof me demande de montrer mon cul devant la classe je le ferais… c’est bizarre que je sois si à l’aise ? ». Voici une sélection des réponses qu’il obtint :

 

• C’est une bonne attitude… mais ne montre pas ton cul devant la classe! Y’a pas mal de mecs dans nos classes d’éducation sexuelle qui font la même choses, qui se marrent et des trucs comme ça, peut-être pour cacher qu’ils sont gênés ou nerveux ou quelque chose comme ça. Nous aussi on a réagi un peu comme ça avec les potes mais on l’a pris quand même au sérieux ; le prof n’était pas très à l’aise de nous enseigner ça, si on peut dire (GT, 15 ans, USA)

• Je suis à l’aise avec ça. La plupart des gens se marrent dès que le mot pénis ou vagin est prononcé. J’avais l’air bizarre. (GT, 13 ans, Royaume-Uni, Newcastle)

• Dans mon cours d’éducation sexuelle, ils nous ont dit au début de ne pas rire ou qu’ils nous feraient sortir et nous devrions rester assis dans le hall pendant 10 minutes environ (GT, 15 ans, USA, Virginie)

• Toute ma classe est restée tranquille dès que le mot ‘sein’ a été prononcé (GT, 14 ans, Royaume-Uni)

• Personne n’a été choqué et personne n’a éclaté de rire non plus. On était garçons et filles et personne ne disait rien, surtout quand on a vu toutes ces photos de gens infectés par des maladies vénériennes et le SIDA. C’était choquant. (GT, 16 ans, USA, Californie)

• A chaque fois que le professeur prononçait le mot masturbation, pénis ou vagin ou d’un truc sexuel, tout le monde dans la classe (sauf moi) se mettait à rire. (GT, 15 ans, USA, Massachusetts)

• A chaque fois qu’ils parlent du pénis, du vagin ou des nichons, les garçons regardent les filles et les filles regardent les mecs en riant. (GT, 13 ans, USA, Chicago)

• J’ai ri seulement quand le prof a demandé une volontaire pour mettre un préservatif sur un pénis (un modèle bien sûr) et la volontaire a eu du mal à le mettre et il s’est déchiré et elle la griffé, lol (GT, 15 ans, Australie)

 

Publié dans Sexualité des ados

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